Votre portail vers l'information stratégique au Bénin, en Afrique et au-delà
Votre portail vers l'information stratégique au Bénin, en Afrique et au-delà

Présidentielle 2026 : la Cour constitutionnelle doit-elle sauver la démocratie ou défendre la loi ?

Politique & Institutions, La Marina BJ Alors que la Cour constitutionnelle se penche ce lundi 27 octobre 2025 sur les nouveaux recours déposés par le parti Les Démocrates, la tension entre l’esprit de la démocratie et la rigueur du droit atteint son paroxysme. Le principal parti d’opposition, écarté du processus électoral par la Commission électorale nationale autonome (CENA) pour défaut d’un seul parrainage, tente de sauver sa participation à la présidentielle d’avril 2026. Mais une question, à la fois politique et philosophique, divise la société béninoise : la Cour doit-elle défendre la lettre de la loi ou l’essence de la démocratie ?

Le 23 octobre, la CENA a rejeté la candidature du duo des Démocrates pour non-respect du seuil de 15 % des parrains exigés par le Code électoral. Avec 27 signatures sur 186 élus — après le retrait de la fiche du député Michel Sodjinou —, le parti se retrouve en dessous du quota requis de 28 parrainages. Juridiquement, la décision de la CENA est irréprochable : elle applique mécaniquement le Code électoral, sans marge d’interprétation. Mais politiquement, la conséquence est vertigineuse : le principal parti d’opposition se retrouve exclu d’une élection majeure à cause d’un seul retrait individuel.

Pour de nombreux observateurs, c’est « inadmissible » qu’un seul élu puisse, à lui seul, compromettre la représentativité d’un courant politique entier. Ils estiment que la Cour constitutionnelle devrait prendre en compte l’esprit du pluralisme démocratique, garanti par la Constitution, et non s’en tenir à une lecture arithmétique du droit électoral.

Le droit avant tout

La position de la Cour constitutionnelle est pourtant balisée. Dans sa décision DCC 21-014 du 17 février 2021, déjà relative à une affaire de parrainage, elle avait rappelé qu’elle ne peut s’immiscer dans le fonctionnement interne des partis politiques et qu’elle n’a pas compétence pour réattribuer un parrainage retiré par un élu.

Cette ligne a été réaffirmée dans la décision EP 25-006 du 23 octobre 2025, où la Cour s’est déclarée incompétente « en l’état » pour trancher le différend entre le député Michel Sodjinou et la direction des Démocrates. Autrement dit, la Cour se considère comme juge du droit, non arbitre de la représentativité politique. Tant que la loi est respectée — même au prix d’une exclusion symboliquement lourde —, elle ne peut pas « sauver » un parti au nom d’un principe moral ou politique.

Cette rigueur institutionnelle, saluée par certains pour sa cohérence, suscite une interrogation profonde au sein de l’opinion publique : le droit peut-il être juste s’il étouffe la démocratie ? En refusant de considérer le contexte, la Cour constitutionnelle prend le risque d’être perçue comme la gardienne d’un ordre juridique fermé, plutôt que comme garante d’un équilibre démocratique vivant. La neutralité devient alors ambiguë : protéger la Constitution, oui — mais à quel prix pour la légitimité du scrutin ? Certains analystes estiment que la Cour aurait pu, sans violer la loi, interpréter la finalité du parrainage comme un mécanisme d’encadrement et non d’exclusion, en rappelant le principe supérieur de pluralisme politique inscrit à l’article 2 et 4 de la Constitution.

Sauver la démocratie ou défendre la loi ?

Le dilemme est profond. En défendant la loi, la Cour conforte l’État de droit et la séparation des pouvoirs ; en sauvant la démocratie, elle enverrait un signal fort en faveur de l’inclusion politique, mais au risque d’un précédent dangereux. Pour l’un de nos spécialistes à la rédaction, cette affaire révèle une tension fondamentale du modèle béninois : la maturité institutionnelle du pays repose désormais sur la capacité de ses juges à faire dialoguer la légalité et la légitimité. Car si le droit garantit la stabilité, la démocratie donne sens au droit.

En conclusion, il s’agit d’un test pour la République. Le verdict attendu dans les prochaines heures ne portera pas seulement sur un dossier électoral. Il dira si la Cour constitutionnelle choisit de rester le rempart juridique d’une démocratie rigide ou l’arbitre éclairé d’un pluralisme en quête d’équilibre. Dans tous les cas, cette séquence laissera une empreinte durable : celle d’un Bénin qui interroge ses institutions sur leur capacité à conjuguer l’exigence du droit et le souffle de la démocratie.

Partager cet article
Lien partageable
Précédent

Projet de budget 2026 : Hausse de 4,2 % des ressources FADeC

Suivant

Budget 2026 – Romuald Wadagni : « les dépenses d’investissement s’établissent à 1211,683 milliards de FCFA »

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Lire article suivant