Politique, Bénin – À l’Assemblée nationale, ce jeudi 5 décembre 2024, les députés du parti de l’opposition Les Démocrates ne se sont pas seulement contentés de voter contre la loi de finances 2025. Ils en ont profité pour délivrer un message poignant, porté à la tribune par l’honorable député Nourénou Atchadé, président du groupe parlementaire du parti d’opposition.
Cette intervention, mêlant constats sévères et appels à la responsabilité, a souligné les défis démocratiques du Bénin tout en exhortant les acteurs politiques à un sursaut d’éthique et de cohésion.
Un parlement sous influence : entre passé douloureux et présent inquiétant
Dans un discours empreint d’une lucidité mordante, le président du groupe parlementaire Les Démocrates a rappelé le lourd héritage laissé par la 8ᵉ législature, qualifiée de « parenthèse accidentelle et douloureuse ». Il a déploré l’époque où, selon ses termes, des acteurs avaient fragilisé, vassalisé et abaissé le Parlement béninois de son piédestal.
Dans la continuité, il a interrogé la capacité de la 9ᵉ législature à relever la barre : « Sommes-nous vraiment dans l’impératif de redonner aux Béninois le Parlement qu’ils méritent ? ». Une question qui s’adresse tant à la majorité qu’à l’opposition, dans un contexte où le rôle de contre-pouvoir du Parlement semble s’effriter au profit d’une proximité excessive avec l’exécutif.
Un cri d’alarme face à des dérives inquiétantes
Le discours a également dénoncé des dérives récurrentes au sein de l’hémicycle. Le président du groupe Les Démocrates a évoqué avec indignation les attaques publiques dirigées contre des députés de l’opposition par des membres de l’administration parlementaire : « Quelle horreur ! Est-il admissible qu’un prétendu porte-parole du président de l’Assemblée s’en prenne aux élus dans l’exercice de leurs prérogatives ? ».
Face à ces pratiques qu’il qualifie de « haine agissante », il a exhorté les parlementaires à se lever contre ce qu’il considère comme une atteinte grave à l’intégrité de leur fonction : « Si, d’une seule voix, nous ne nous insurgeons pas contre ces dérives, à qui le tour ? ».
La tragédie de Fayçal Ouorou, jeune victime d’une bavure policière survenue le 19 novembre 2024 à Parakou, a également trouvé une place centrale dans le discours. Avec émotion, le président du groupe a dénoncé une police devenue « bourreau du peuple » et a mis en cause une réforme « improvisée et mal opérationnalisée ». Critiquant le Directeur général de la police républicaine (DGPR) pour son inaction passée, il a fustigé une déclaration tardive promettant une formation en techniques de maîtrise sans arme de l’adversaire (MSAA). Pour lui, cette annonce reflète une « incompétence manifeste » : « Sous d’autres cieux, cette déclaration suffirait à faire démissionner le DGPR ».
Des libertés politiques bafouées : le cas de N’Dali
Dans un passage particulièrement incisif, le président du groupe Les Démocrates a dénoncé les entraves aux libertés politiques dont son parti a été victime à N’Dali. Il a décrit comment les militants du parti avaient été « encerclés et brutalisés par des militaires », sous l’ordre d’un commissaire instrumentalisé. « Il est inadmissible que les partis de la mouvance aient libre champ d’organiser leurs activités politiques, tandis qu’un refus de s’organiser soit opposé à l’opposition », a-t-il martelé, dénonçant une injustice criante.
Le discours s’est conclu sur un appel à la conscience collective des députés : « Un parlement vassalisé, clochardisé, ne peut pas préserver la démocratie ». Le président du groupe parlementaire Les Démocrates a invité tous les acteurs politiques à se souvenir de leur responsabilité historique : « La mémoire collective des Béninois retient que le Parlement est sous ordre de l’exécutif. Il faut que cela cesse, et tout de suite ».