Réformes, Bénin – Le 13 mars 2025, l’Assemblée nationale du Bénin a adopté la loi N° 2025-09 régissant les chefferies traditionnelles du pays. Ce texte, tout en visant à structurer et reconnaître le rôle de ces institutions séculaires, a suscité de vives réactions parmi les élus. Après le vote, des voix discordantes se sont élevées, notamment celles du député de l’opposition Kolawolé Djima Ogbom et du député de la mouvance, Nassirou Arifari Bako. Ces interventions éclairent le débat autour d’une loi jugée à la fois nécessaire et controversée.
Dans une intervention marquée par son opposition, Kolawolé Djima Ogbom, député du parti Les Démocrates, a qualifié cette législation de « loi polémique ». Selon lui, cette loi pourrait même engendrer de graves problèmes pour le pays. Il a souligné que, à ses yeux, ce texte apparaissait comme une « constitution propre aux chefferies traditionnelles », qui aurait dû être soumise à une consultation plus élargie, notamment auprès des chefferies elles-mêmes.
L’élu a critiqué le travail de la Commission en charge des consultations, notamment le rapport sur les discussions menées à Savè. Selon lui, malgré l’accord des dignitaires Tchabés pour la réintégration de la dynastie hamoutchou, la Commission a ignoré ces aspirations. Cela a provoqué un sentiment de frustration au sein de certaines communautés, comme l’a affirmé le député du parti Les Démocrates, qui se décrit comme représentant du peuple et fils des Tchabés. Ce mécontentement l’a conduit à voter contre la loi, qu’il considère comme non représentative des réalités locales.
Appel à éviter la technocratie
De son côté, Nassirou Arifari Bako, député de la mouvance, a exprimé des réserves sur la manière dont le processus législatif s’est déroulé. Il affirme avoir eu ”le sentiment qu’une certaine technocratie s’est imposée.” Autrement, selon l’ancien ministre des Affaires Étrangères, la loi a été influencée par une « technocratie » qui a conditionné certains amendements à l’avis de comités techniques absents lors des débats.
L’élu de la première circonscription électorale a insisté sur la nécessité d’éviter que cette tendance s’intensifie à l’avenir. Il a également pris position sur la question de l’émirat, qu’il a jugée mal comprise dans le cadre de la loi. Le député a rejeté l’idée selon laquelle l’émirat renverrait à une autorité religieuse, expliquant qu’il s’agissait avant tout d’un titre de chef temporel, comme le roi, et non d’une fonction liée à la religion. Pour le député du Bloc Républicain, ce malentendu met en exergue une confusion entre les concepts scientifiques et religieux.
Un cadre juridique pour les chefferies traditionnelles
La loi 2025-09, bien qu’ayant suscité des oppositions, met en place un cadre juridique clair pour les chefferies traditionnelles au Bénin. Elle reconnaît trois catégories de chefferies, à savoir les royaumes (chefferies centralisées, au nombre de 16), les chefferies supérieures (peu centralisées, au nombre de 80) et les chefferies coutumières (non centralisées, au nombre de 10). Le texte définit aussi les critères pour désigner les chefs traditionnels, en insistant sur la nécessité qu’ils jouissent de leurs droits civiques et politiques.
Les critiques, notamment celles des parlementaires Kolawolé Djima Ogbom et Nassirou Arifari Bako, révèlent les tensions autour de la reconnaissance de certaines dynasties et des risques de dérives technocratiques dans le processus législatif. Malgré tout, cette loi pourrait marquer un tournant important dans la reconnaissance officielle de la chefferie traditionnelle, en offrant un cadre juridique aux autorités coutumières du pays.