Politique, La Marina BJ – À mesure que s’approche l’ouverture du dépôt des candidatures pour la présidentielle d’avril 2026, l’opposition béninoise s’active davantage. Loin, cette fois-ci, des invectives publiques et des conférences de presse répétitives, le vrai travail se joue désormais en coulisses, à Cadjèhoun, dans la résidence de Thomas Boni Yayi. L’ancien président, figure tutélaire des Démocrates, a repris son rôle d’arbitre et orchestre un ballet politique dont il détient seul la clé : la désignation du duo présidentiel appelé à affronter la machine électorale de la mouvance.
Depuis quelques jours, la villa de Boni Yayi est devenue un passage obligé. Célestine Zanou a ouvert la séquence, suivie de Ganiou Soglo, critique aguerri du régime, et de l’inusable Alain Adihou. Bien avant eux, Daniel Edah, jusque-là électron libre, avait acté son ralliement au parti Les Démocrates (LMBJ, 26-09-2025). Tous sont venus livrer leur diagnostic sur l’état du pays : chômage endémique, injustices fiscales, climat électoral dégradé. Le constat est partagé : face à une mouvance déjà structurée derrière le ministre d’État Romuald Wadagni, l’opposition ne peut se permettre la division.
Ces audiences vont bien au-delà de la courtoisie. Elles se sont muées en véritables séances de calibration politique où chacun teste ses chances, pèse ses arguments et cherche à s’assurer d’un rôle dans la désignation du tandem présidentiel. Boni Yayi écoute, prend des notes, temporise. Il ne tranche pas. Du moins, pas encore.
L’équation du duo présidentiel
Le choix du tandem président/vice-président doit refléter un subtil équilibre. Il faut concilier Nord et Sud, allier figures d’expérience et visages neufs, satisfaire les militants historiques tout en rassurant les nouveaux alliés. Boni Yayi sait que la moindre erreur de casting peut fracturer une opposition fragile. D’où sa stratégie du pas-à-pas : multiplier les consultations, sonder les rapports de force, temporiser, laisser décanter avant d’arbitrer.
C’est dans ce contexte que le 28 septembre 2025, le comité ad hoc a officialisé un appel à candidatures interne pour les postes de président et vice-président. L’enjeu est d’identifier « de manière transparente et objective le duo candidat du parti Les Démocrates ».
Les critères imposés – ancrage politique, réputation irréprochable, leadership rassembleur, vision de gouvernance conforme aux idéaux du parti – renforcés par une caution de 25 millions de F CFA (dont 20 restitués en cas de non-sélection) ne sont pas neutres : ils permettent d’écarter les candidatures fragiles et donnent à Yayi un outil institutionnel pour arbitrer en dernier ressort. La date limite est fixée au 4 octobre 2025, soit à le jour de l’investiture du duo de la mouvance.
Cette démarche vise à formaliser la compétition interne et à renforcer la légitimité du futur duo, tout en donnant au président du parti l’outil institutionnel pour arbitrer en dernier ressort.
Le pari du timing
En temporisant, Les Démocrates prennent toujours le risque d’être accusés d’immobilisme. Mais une annonce précipitée pourrait aussi fracturer le parti. Boni Yayi assume ce dilemme : écouter, absorber, temporiser avant de trancher. Au-delà du calendrier désormais fixé, une question demeure : le tandem choisi sera-t-il à la hauteur de l’enjeu historique, celui d’incarner une alternative crédible face à un régime en avance dans la course ?
Pour l’instant, chez Les Démocrates, la politique se fait encore dans les salons feutrés, entre confidences et serments d’unité. Mais le processus engagé – entre consultations, critères verrouillés et arbitrage personnel de Boni Yayi – annonce l’inévitable : tôt ou tard, le parti de l’ancien président dévoilera son choix. Et dans cette présidentielle à haut risque, ce choix ne sera pas seulement un casting. Ce sera un acte fondateur.