Sécurité, Bénin – La commune de Banikoara, située dans le département de l’Alibori, au nord du Bénin, est en proie à une insécurité grandissante. C’est ce que révèle un rapport alarmant du Centre africain d’études sur la paix, Timbuktu Institute, rendu public ce lundi 17 mars 2025.
Ce document, nommé “Terrorisme au nord du Bénin : éviter une crise sécuritaire à Banikoara”, met en lumière une infiltration croissante des groupes terroristes dans la localité, la fragilisation de l’économie locale et les limites des stratégies sécuritaires mises en place.
Une infiltration terroriste de plus en plus marquée
D’après les témoignages recueillis par Timbuktu Institute, la situation à Banikoara est préoccupante. Les populations locales font état d’une présence accrue d’éléments terroristes qui se mêlent aux habitants, au point de semer la confusion dans les villages. « Nous ne savons plus qui est qui dans nos villages. Nous sommes stupéfaits de constater que les terroristes connaissent nos localités mieux que nous », témoigne un agriculteur interrogé.
Le rapport souligne également que certains terroristes bénéficieraient de complicités locales, parfois sous la contrainte. Un résident de la commune affirme ainsi que « les assaillants, plus de 100, du 8 janvier, auraient été hébergés la nuit précédant l’attaque par un habitant de Banikoara. » Cette proximité avec les groupes armés crée un climat de méfiance généralisé et nuit à la collaboration entre les populations et les forces de sécurité.
Une économie fragilisée, un terreau propice à l’insécurité
Le rapport met également en évidence les facteurs économiques qui accentuent la vulnérabilité de la région face à l’extrémisme. Parmi eux, le trafic de carburant, devenu une activité lucrative pour de nombreux jeunes, est pointé du doigt. Selon une source locale, les jeunes bénéficieraient « d’une marge bénéficiaire de plus de 50 %, et en cas de pénurie de carburant, elle monte à plus de 150 % sur chaque bidon de 25 litres douteux. »
Autre élément inquiétant : la crise de la filière coton, qui constitue le principal moteur économique de la commune. La flambée des prix des intrants agricoles compromet sérieusement la campagne cotonnière 2024-2025. Un producteur de coton confie, selon une citation du rapport, en ces termes : « Nous avons engagé des remboursements de plus de 50 % sur le prix de vente uniquement pour les intrants. » Cette précarité économique croissante pourrait, selon les experts, favoriser le recrutement des jeunes par les groupes terroristes.
Des mesures sécuritaires jugées insuffisantes
Si l’État béninois a renforcé la présence des forces de défense et de sécurité dans la région, les habitants estiment que ces mesures restent limitées. Un citoyen interrogé déclare que « notre commune est vaste et nous partageons une frontière avec le Parc W. Il est donc essentiel que le Bénin entoure la commune d’un mur militaire. »
Par ailleurs, la stratégie de renseignement est critiquée pour son manque de fiabilité. « Lorsque vous signalez deux ou trois fois, les soldats se demandent comment vous obtenez cette information à chaque fois et vous risquez d’être pris. », rapporte un habitant cité dans le rapport. Cette méfiance mutuelle entrave la coopération entre la population et les forces de l’ordre, rendant la lutte contre le terrorisme encore plus complexe.
Quelles solutions pour enrayer la menace ?
Face à cette montée de l’insécurité, le rapport de Timbuktu Institute recommande une approche plus globale pour restaurer la confiance entre les habitants et les forces de sécurité. Il propose notamment des mesures économiques pour offrir des alternatives viables aux jeunes, notamment par des subventions aux petites entreprises, des groupements économiques et un assouplissement des réformes fiscales.
De plus, une refonte de la stratégie sécuritaire est suggérée, en misant davantage sur le renseignement collaboratif et le dialogue communautaire. Enfin, des initiatives civilo-militaires, comme la construction d’écoles et de puits par les forces de défense, sont recommandées afin de renforcer les liens avec la population et de contrer la propagande des groupes terroristes.
Le rapport tire la sonnette d’alarme , sans intervention rapide, Banikoara pourrait devenir un foyer de plus en plus instable.