L’événement, Bénin – Contrairement à l’audience du 7 octobre dernier, celle de ce lundi 18 novembre 2024 n’a pas été de courte durée. C’est un peu après 11 heures que l’audience a débuté, en présence de l’accusé Steve Amoussou, de ses avocats, de membres de sa famille, de journalistes et de quelques curieux. Retour sur une journée où accusations, controverses et révélations ont ponctué les débats.
L’audience a démarré sur un ton marqué par la confrontation juridique. À peine le juge a interrogé Steve Amoussou sur ses éventuelles activités de chroniqueur, l’un de ses avocats a immédiatement soulevé une exception de nullité de la procédure. Tour à tour, les avocats de la défense ont rappelé que leur client avait été victime d’un enlèvement et ont exigé sa remise en liberté, arguant que la procédure était entachée de multiples irrégularités.
Maître Julien Togbadja a notamment dénoncé les conditions de l’arrestation de Steve Amoussou. Selon lui, ce dernier, arrêté et interrogé dans la même nuit, avait demandé à contacter un avocat dès le lendemain, une requête catégoriquement refusée par les forces de police. D’après l’avocat de la défense « Quand vous jugez et condamnez les voleurs d’un bien, alors le bien doit être restitué », faisant allusion aux ravisseurs de son client, déjà condamnés.
En réponse, le parquet spécial a demandé au magistrat du siège de rejeter l’ensemble des exceptions soulevées par la défense. Selon le ministère public, il s’agit de déterminer si l’accusé est coupable de propos injurieux et xénophobes susceptibles de semer la division au sein du pays.
L’intervention de Steve Amoussou
Profitant d’un moment de prise de parole accordé par le juge, Steve Amoussou a témoigné sur les circonstances de son enlèvement, qu’il qualifie de traumatisantes. Dans un ton empreint d’émotion, il a déclaré que ce qu’il a vécu lors de l’enlèvement « est le stade suprême de la sorcellerie. » L’accusé a également exprimé sa frustration face à la libération prochaine de ses ravisseurs, alors que lui-même risque une incarcération prolongée : « D’ici quelques mois, ils vont retrouver la liberté et continuer à narguer ma famille, alors que moi, je serai en prison. » Malgré les tensions entre les différentes parties, le juge a décidé de renvoyer l’affaire au 9 décembre 2024, sans trancher sur les arguments de nullité.
Au terme de l’audience, l’avocat de Steve Amoussou, Me Barnabé Gbago, a livré une critique acerbe de la procédure judiciaire en cours. Répondant aux questions de la journaliste Rachida Houssou, il a dénoncé les irrégularités qui ont marqué l’arrestation de son client à Lomé, au Togo. « Dans un État de droit, on ne peut pas accepter ce genre de procédure viciée. On a pris Steve Amoussou en pleine nuit, sans respecter aucune règle, ni même le droit international. », a-t-il souligné.
Selon l’avocat, le « rapt » de Steve Amoussou à Lomé aurait impliqué des commissaires béninois et togolais, en violation flagrante des accords juridiques entre les deux pays. D’après lui « rien n’a été respecté. Il existe une convention entre le Bénin et le Togo, mais elle a été totalement ignorée. »
Des commissaires impliqués : une révélation à venir
Un point particulièrement marquant de l’intervention de Me Gbago au micro de Rachida Houssou a été la révélation qu’au moins deux commissaires de police seraient impliqués dans l’affaire du « rapt ». L’avocat a promis de dévoiler prochainement leur identité. Pour Me Barnabé Gbago « on a fait une parodie de justice pour condamner deux personnes, alors qu’il y a au moins cinq personnes en jeu, dont deux commissaires de police qui sont en jeu dans ce cas-ci. Nous les révélerons, parce que au Togo, c’est clair, c’est dans les PV de Togo». Me Gbago a également accusé la cour de Repression des Infractions Économiques et du terrorisme (CRIET) de partialité, affirmant qu’elle « est une justice illusoire ». Pour lui, l’intervention des juridictions togolaises pourrait être déterminante, car « pour une fois, la CRIET ne pourra plus faire ce qu’elle veut. »
La prochaine audience, prévue le 9 décembre, pourrait être le théâtre de révélations déterminantes, notamment sur l’implication présumée des « commissaires de police ». Affaire à suivre.