Énergie, Bénin – Le Projet d’électrification rurale (PERU), lancé pour améliorer l’accès à l’électricité dans les zones rurales du Bénin, est freiné par des retards financiers importants et la dissolution de l’Agence Béninoise d’Électrification Rurale et de Maîtrise de l’Énergie (ABERME).
Le rapport d’exécution et des résultats (EER), daté du 23 août 2024 et publié le 13 septembre 2024,dresse un bilan mitigé. Bien que le projet ait atteint un taux d’exécution physique de 55,45 %, ces deux obstacles majeurs ralentissent l’avancement des travaux et compromettent l’atteinte des objectifs à temps.
La dissolution de l’ABERME : une réorganisation qui freine le projet
La dissolution de l’ABERME, l’agence responsable de la supervision des travaux d’électrification, a considérablement ralenti l’avancement du projet. Selon le rapport, préparé à la suite d’une mission de supervision conduite du 26 au 28 juin 2024 par Eric PREGNON et Moussa Adama, ce changement institutionnel a perturbé la gestion du projet, entraînant des retards dans la prise de décision et le traitement des dossiers administratifs. La transition vers de nouvelles structures n’a pas été fluide, et cela s’est reflété dans les blocages observés dans l’exécution des travaux sur le terrain.
Le transfert des responsabilités à d’autres entités n’a pas été exempt de difficultés, et cette réorganisation administrative a directement affecté le rythme de l’installation des infrastructures dans les localités rurales. Cette situation a mis en péril l’objectif du projet, qui vise à électrifier 209 localités d’ici 2025.
Des progrès malgré les défis institutionnels
Malgré ces difficultés, certains progrès ont été réalisés sur le terrain. À la date de l’actuelle mission, 20 localités ont été électrifiées, contre 17 lors de la précédente mission de supervision. Ce chiffre représente environ 33 % des localités prévues dans la phase financée par les ressources nationales. Cela montre que, bien que perturbée, l’exécution des travaux avance, même si le rythme est bien inférieur aux attentes initiales.
L’installation des poteaux en béton armé a également progressé; 100 localités ont été équipées contre 37 lors de la dernière mission. En tout, 8 988 poteaux ont été implantés, soit 37 % des 24 587 poteaux nécessaires à la réalisation du projet. Ce rythme montre une montée en cadence des infrastructures, mais le rapport avertit qu’il sera difficile d’atteindre les objectifs finaux sans une accélération significative.
Le tirage des câbles a débuté dans six nouvelles localités, un signe que les travaux avancent malgré les obstacles institutionnels. Cependant, le rapport souligne que cette progression reste bien en deçà des attentes et qu’il faut s’attendre à de nouveaux retards si des mesures correctives ne sont pas rapidement adoptées.
Décaissement des fonds : un autre frein à l’avancement
Un autre obstacle majeur à l’avancement du projet est le faible taux de décaissement des fonds alloués par la Banque Africaine de Développement (BAD). Selon le rapport, seulement 36,59 % des fonds avaient été décaissés, bien en dessous du taux prévu de 77,27 %. Ce retard dans les paiements aux entreprises chargées des travaux a exacerbé les ralentissements déjà causés par la réorganisation institutionnelle.
En ce qui concerne le cofinancement assuré par la Banque d’Investissement et de Développement de la CEDEAO (BIDC), aucune localité n’a encore été électrifiée avec ces ressources, bien que des progrès dans les études techniques et topographiques aient été constatés. 86 localités sur les 100 prévues ont vu leurs itinéraires validés, ce qui laisse espérer une accélération prochaine de l’exécution des travaux une fois ces étapes préparatoires terminées.
Des mesures correctives pour relancer le projet
Pour surmonter les défis liés à la dissolution de l’ABERME et aux retards financiers, le rapport d’exécution propose plusieurs mesures correctives. D’abord, il est impératif de réorganiser rapidement les responsabilités institutionnelles pour stabiliser la gestion du projet et éviter d’autres retards. Il est recommandé de maintenir l’équipe de gestion de projet (UGP) pour garantir la continuité des opérations et éviter toute rupture dans l’exécution des travaux.
Ensuite, le rapport suggère d’organiser des réunions hebdomadaires de suivi afin de maintenir la pression sur les entreprises en charge des travaux. Cela permettra de s’assurer que les retards constatés ne se prolongent pas et que les installations prévues se déroulent dans les délais impartis. Enfin, il est essentiel d’accélérer le décaissement des fonds pour permettre aux entreprises d’accélérer les installations d’infrastructures électriques. Une gestion plus rigoureuse des fonds, associée à une révision rapide des contrats des entreprises, est nécessaire pour éviter de nouveaux blocages et permettre une progression plus fluide du projet.
Encore du chemin à parcourir
Bien que la dissolution de l’ABERME et les retards de décaissement aient lourdement pesé sur l’avancement du projet, le rapport reste optimiste quant à la possibilité de rattraper le temps perdu. Avec un taux d’exécution physique de 55,45 %, il est encore possible de respecter les échéances prévues pour la fin de 2025, mais cela nécessitera une accélération significative des travaux.
Les autorités béninoises, en collaboration avec les bailleurs de fonds, notamment la BAD et la BIDC, doivent rapidement prendre les mesures nécessaires pour débloquer les retards et accélérer l’exécution. Si ces efforts sont intensifiés, l’électrification des localités prévues pourrait être réalisée dans les délais, apportant des avantages significatifs aux communautés rurales béninoises.