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Monsieur le député, quand une loi est injuste, il faut le dire

Politique, Bénin« Dès que vous partez déjà avec l’hypothèse que la loi est injuste, cela veut dire que vous risquez de ne pas vous faire écouter par tous les camps ». C’est ainsi que le député du parti Bloc Républicain Malick Seibou Gomina a interpellé la société civile béninoise lors d’une table ronde virtuelle organisée le 10 octobre 2024 par le think tank Wathi et la Fondation Konrad Adenauer sur le thème : Réformes électorales et perspectives politiques au Bénin

Pour le député de la majorité présidentielle, il est crucial de ne pas aborder le code électoral modifié en mars dernier avec un jugement préconçu d’injustice, sous peine de compromettre le dialogue entre les différents acteurs. Mais cette mise en garde soulève une question fondamentale : peut-on réellement éviter de critiquer une loi perçue comme problématique pour ne pas froisser certaines sensibilités politiques, même majoritaires ?

Le député semble vouloir encourager une modération des discours afin de maintenir un espace de discussion ouvert. Mais comment peut-on espérer un dialogue honnête si l’on impose des limites à l’expression des critiques dès le départ ? Lorsqu’une loi divise autant qu’elle le fait actuellement, il est légitime que des voix s’élèvent pour exprimer leur mécontentement. La société civile, en particulier, a pour rôle de mettre en lumière ces dysfonctionnements pour mieux orienter le débat public.

La nécessité de dénoncer ce qui ne va pas

L’idée que la société civile devrait éviter d’attaquer frontalement le code électoral repose sur une logique de prudence, mais cela risque d’étouffer les critiques légitimes. Si cette loi électorale suscite autant de débats, c’est qu’elle est perçue comme inadaptée par une partie de la population. L’opposition politique, l’Église catholique, la Plateforme électorale des Organisations de la société civile (OSC), etc, ont exprimé des réserves importantes à son égard, allant jusqu’à organiser des discussions pour évaluer son impact. Ignorer ces préoccupations pour éviter des remous ne ferait que renforcer le sentiment d’injustice.

En demandant à la société civile de ne pas présenter la loi comme injuste, l’honorable député Malick Seibou Gomina semble encourager une autocensure qui pourrait nuire à la qualité du débat. La société civile, rappelons-le, n’est pas là pour plaire ou flatter les pouvoirs en place, mais pour représenter les citoyens et porter leur voix. Dans une démocratie, la critique n’est pas un obstacle à la discussion, elle est au contraire un outil indispensable pour améliorer les textes de loi et les politiques publiques.

Le code électoral adopté en mars continue de diviser, et il est normal que cela suscite des débats. Si la société civile estime que ce texte présente des failles, elle doit pouvoir le dire sans crainte de se voir écartée du dialogue. Après tout, une loi qui ne satisfait pas une partie de la population doit être questionnée et, si nécessaire, révisée.

Un dialogue sous conditions ?

L’ancien journaliste Malick Seibou Gomina affirme qu’aucune porte n’est fermée et que le dialogue est encore possible. Mais peut-on réellement dialoguer si l’une des conditions implicites est de ne pas critiquer trop ouvertement ? Un véritable débat suppose que toutes les opinions puissent être exprimées librement, y compris les plus critiques. Demander à la société civile de tempérer son discours sous prétexte de maintenir un climat apaisé, c’est risquer de rendre le débat inauthentique.

La société civile doit continuer à dénoncer ce qui ne va pas. Si une loi est perçue comme injuste, il est essentiel de le dire, même si cela ne plaît pas à tous les camps. Le rôle d’un dialogue démocratique est de confronter les idées pour parvenir à des solutions partagées, pas de masquer les problèmes sous des discours édulcorés.

Le code électoral modifié en mars dernier divise, c’est un fait. Monsieur le député, quand une loi est perçue comme mauvaise, il faut le dire. Ce n’est qu’en acceptant les critiques que le dialogue pourra véritablement permettre des avancées constructives pour le Bénin. Parce que, quand c’est mauvais, on ne peut pas simplement faire semblant que tout va bien. Et aucune porte ne doit être fermée pour sa relecture.

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