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Défiance et refus de plaider sans avocats au round 4 du procès contre l’autorité de l’État

Justice, Bénin Le quatrième jour du procès de l’affaire dite du « complot contre l’autorité de l’État » s’est déroulé hier, mardi 28 janvier 2025, à la Cour de Répression des Infractions Économiques et du Terrorisme (CRIET), dans une atmosphère lourde, marquée par un refus catégorique des principaux accusés de s’exprimer sans l’assistance de leurs avocats. Olivier Boko et Oswald Homeky, figures centrales du dossier, ont adopté une posture de défiance face à une procédure qu’ils continuent de juger viciée. Malgré des témoignages accablants, notamment celui du colonel Djimon Tévoédjrè, la ligne de défense des accusés semble désormais claire : dénoncer une justice qu’ils estiment verrouillée et refuser toute participation à un débat qu’ils considèrent inéquitable.

Selon plusieurs médias présents à l’audience, la journée a débuté par un constat : l’absence des avocats de la défense. Selon Olivier Boko, ses avocats avaient tenté de le rencontrer en prison mais auraient été empêchés par l’administration pénitentiaire. Oswald Homeky, pour sa part, a expliqué avoir contacté des avocats qui ne se sont pas présentés ce matin-là.

Face à cette impasse, le procureur spécial Mario Metonou a fermement rappelé que l’absence d’avocats ne saurait bloquer la procédure : « Les accusés, ayant volontairement écarté leurs précédents avocats, n’en ont pas constitué de nouveaux. » Allant dans le même sens que le parquet spécial, la présidente de céans a ordonné la poursuite des débats en faisant appel aux témoins.

« Faire semblant d’y adhérer »

Lors de cette quatrième journée du procès, le témoin clé de l’affaire, le colonel Dieudonné Tévoédjrè, a dévoilé les coulisses d’un projet visant à renverser le régime du président Patrice Talon. Selon le commandant de la Garde républicaine, tout a commencé le 30 mai 2024, lorsque l’ex-ministre des Sports, Oswald Homeky, un ami proche du colonel, l’a invité chez lui et a entamé des discussions critiques sur la gouvernance du chef de l’État. Progressivement, les échanges ont pris une tournure inquiétante, avec des cadeaux financiers, l’ouverture d’un compte bancaire alimenté par des fonds mystérieux, et surtout des allusions explicites à un putsch.

Le 30 juillet, Homeky a évoqué pour la première fois un coup d’État, insistant sur la nécessité de disposer de ressources financières conséquentes. Une somme de 1,5 milliard de FCFA aurait alors été fixée pour recruter des hommes et garantir le succès de l’opération, initialement prévue pour le 30 septembre, puis avancée au 27 septembre, une période où le chef de l’État, Patrice Talon, devait être absent du territoire national.

Selon les propos du témoin rapportés par des médias sur place, si le coup d’État avait réussi, il aurait été chef de la junte jusqu’en 2026, avec Oswald Homeky comme conseiller spécial et l’ex-ministre de la Justice, Sévérin Quenum, à la tête de la Cour constitutionnelle. Même s’il affirme avoir agi dans l’intérêt de l’État, cherchant à déjouer la machination avant qu’elle ne se concrétise, il se défend également d’avoir tendu un piège à son ami Homeky, affirmant avoir pris des risques pour neutraliser un plan dont il n’a jamais voulu être complice. Concernant Olivier Boko, le prétendu « grand frère » cité lors de l’une de leurs conversations, le colonel a déclaré à la barre qu’il s’agissait sûrement d’un choix délibéré de la part d’Olivier Boko de ne pas le contacter directement.

« Si vous croyez ce que le colonel a dit ce matin, condamnez-moi » : la contre-offensive d’Oswald Homeky

L’intervention d’Oswald Homeky, de retour à la barre après les témoignages du colonel Tévoédjrè en fin de journée, semble résumer la stratégie des deux principaux accusés. L’ancien ministre a dénoncé une procédure biaisée, affirmant ne pas avoir eu l’opportunité de se défendre avec l’assistance de ses avocats. Il rejette les accusations de complot de coup d’État portées contre lui, qualifiant les déclarations du colonel Tévoédjrè de manipulation.

Homeky s’est interrogé sur la cohérence des accusations. S’il avait réellement planifié un coup d’État, pourquoi aurait-il remis personnellement des fonds à son ami dans un cadre aussi exposé ? Il remet également en question les motivations du colonel, rappelant que ce dernier, témoignant à la barre, a affirmé qu’il ne lâcherait jamais le pouvoir s’il lui était confié.

L’ancien ministre soutient que l’affaire est politiquement instrumentalisée, évoquant le rôle d’Olivier Boko, également accusé, qu’il considère comme le mieux préparé pour une éventuelle candidature présidentielle. Il rappelle que sa propre démission du gouvernement visait à préserver son honneur.

Si l’on doit retenir quelque chose d’autre de son intervention, c’est une déclaration aussi lapidaire qu’énigmatique. Selon les éléments rapportés par des médias, l’ex-ministre des Sports a déclaré : « Si vous croyez ce que le colonel a dit ce matin, condamnez-moi. Il existe un Dieu… J’appartiens au système, je sais, je sais, je sais. » Une phrase lourde de sens, laissant entendre qu’il en sait plus qu’il ne peut ou ne veut en dire. Derrière cette déclaration, un message subtil se dessine : l’ancien ministre se considère comme un rouage du pouvoir et insinue que le procès pourrait relever davantage d’un règlement de comptes politique que d’une véritable quête de justice.

Olivier Boko, un silence stratégique face à une justice qu’il conteste

De son côté, Olivier Boko a adopté une posture encore plus tranchée. D’un ton maîtrisé, il a refusé de se prêter au jeu du procès en l’absence de ses avocats. Selon les éléments rapportés par plusieurs médias, il a déclaré à la Cour : « Je suis dans l’obligation de vous dire que je ne vais pas pouvoir déposer devant vous sans mes avocats. »

Par cette déclaration, il envoie un signal : celui de ne pas reconnaître la légitimité d’un procès mené dans ces conditions. Son silence n’est pas une absence de défense, mais une forme de résistance. À travers cette posture, l’accusé mise sur l’argument d’une procédure biaisée, espérant ainsi fragiliser la crédibilité des débats.

Son refus de répondre aux accusations, malgré la gravité des témoignages, s’inscrit dans une stratégie visant à discréditer l’ensemble du procès. Pour Olivier Boko, parler sans avocats reviendrait à valider une procédure qu’il juge tronquée.

Suspendu, le procès doit reprendre ce mercredi 29 janvier 2025.

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