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Disparitions forcées : l’ONU presse le Bénin d’accélérer la réforme de son Code pénal

Droits humains, La Marina BJLe Comité des Nations Unies sur les disparitions forcées (CED) a rendu publiques, le 7 octobre 2025 à Genève, ses conclusions à l’issue de l’examen du rapport national du Bénin sur la mise en œuvre de la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées. Si l’instance onusienne salue la volonté exprimée par l’État béninois d’intégrer la disparition forcée dans le Code pénal, elle insiste sur la nécessité d’aller plus loin et plus vite dans la traduction de cet engagement en dispositions effectives. Pour le Comité, la lenteur du processus législatif risque de maintenir une zone d’ombre dans la qualification et la poursuite de ce crime.

Dans son communiqué, le Comité se dit satisfait par la déclaration de la délégation béninoise, qui a pris part, les 23 et 24 septembre 2025, aux travaux relatifs au rapport initial du Bénin devant le Comité des disparitions forcées, selon laquelle l’État prévoit d’inscrire la disparition forcée comme infraction distincte, assortie de sanctions proportionnées à la gravité du crime. Cependant, les experts rappellent que la définition actuelle du droit béninois ne couvre que les crimes contre l’humanité dits de « nature prolongée ».

Cette formulation limite la possibilité d’engager des poursuites en dehors d’un contexte de violation massive des droits. Le CED recommande donc de criminaliser la disparition forcée comme une infraction autonome, d’amender la qualification de crime contre l’humanité pour en retirer la condition de durée prolongée et d’inclure explicitement dans le Code pénal « toute autre forme de privation de liberté ». Il s’agit, pour les Nations Unies, de garantir que chaque cas, quel qu’en soit le contexte, puisse donner lieu à une enquête, une poursuite et une sanction proportionnées.


Des garanties constitutionnelles encore inégalement appliquées

Sur le terrain des garanties fondamentales, le Comité note avec satisfaction les dispositions constitutionnelles et pénales censées protéger les personnes privées de liberté. Mais il s’inquiète du décalage entre la norme et la pratique, évoquant des allégations de détention au secret, de retards dans la notification aux familles et d’un accès limité à la défense. Il recommande au Bénin de veiller à ce que toute personne détenue soit informée de ses droits, qu’elle puisse communiquer sans entrave avec son avocat et ses proches, et qu’elle ait le droit, en toutes circonstances, de contester la légalité de sa détention devant une autorité judiciaire. Le Comité insiste également sur l’importance de la transparence des procédures et de la traçabilité des lieux de détention, considérées comme les premiers garde-fous contre les disparitions arbitraires.

Pour les experts onusiens, la lutte contre les disparitions forcées ne se réduit pas à un chantier pénal : elle implique un renforcement global du système judiciaire, une formation accrue des forces de sécurité et des magistrats, ainsi que la mise en place d’un registre centralisé recensant toutes les personnes privées de liberté. L’objectif est de garantir que nul ne puisse être arrêté ou transféré sans trace administrative, ni privé de contact avec le monde extérieur. Ces recommandations s’inscrivent dans une logique de prévention structurelle et de consolidation de l’État de droit.


D’un examen international à une mise en œuvre nationale

La publication de ces conclusions marque l’aboutissement d’un processus engagé plusieurs mois auparavant. Le Bénin, qui a ratifié la Convention en 2017, avait présenté son rapport initial au Comité à Genève fin septembre 2025. Ce document, élaboré par le gouvernement, faisait le point sur les avancées nationales en matière de protection contre les disparitions forcées et sur les réformes envisagées. Durant la session, la délégation béninoise a été entendue par les experts, qui ont confronté les informations officielles aux données issues d’autres sources, notamment d’organisations internationales et de la société civile.

La déclaration du 7 octobre 2025 constitue donc la synthèse finale de ce dialogue entre l’État béninois et le Comité onusien. Elle ouvre une nouvelle phase : celle de la mise en œuvre des recommandations. Dans les douze à vingt-quatre prochains mois, le Bénin devra soumettre un rapport de suivi détaillant les mesures prises pour adapter sa législation et améliorer la protection des libertés individuelles. Le Comité pourra, en cas de besoin, diligenter une mission technique dans le pays afin d’évaluer les progrès réalisés. À terme, cet exercice vise à faire du Bénin un exemple de conformité avec les standards internationaux en matière de droits humains, tout en consolidant la crédibilité de son système judiciaire.

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