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Affaire Steve Amoussou : La famille brise le silence et dénonce les abus de la justice béninoise

Justice, Bénin« L’une des premières questions posées à notre jeune frère fut : “Comment avez-vous su qu’il est ici ?”, ce à quoi il répondit : “Parce que je l’ai cherché partout ailleurs.” “Qui d’autre le sait ?” lui demanda-t-on. “Notre famille, ses avocats, tout le monde !” “Mais pourquoi ?” reprit l’officier. “Parce que nous avions peur pour sa vie.” À cette réponse, il n’y eut plus de questions, probablement parce que l’officier reconnut la légitimité de cette inquiétude… »

Après plusieurs semaines de silence, la famille Amoussou a décidé de publier une lettre ouverte le samedi 28 septembre 2024 afin de dénoncer les abus dont leur frère, Steve Amoussou, est victime.

Un procès expéditif entaché d’irrégularités

Tout d’abord un rappel des faits. Selon la famille, Steve Amoussou n’était visé par aucune enquête, ni au Bénin, ni au Togo, ni par Interpol, au moment de son enlèvement. « Qui l’aurait enlevé et pourquoi ? » s’interroge-t-elle. Ramené secrètement au Bénin, il a été détenu sans notification légale à l’Office Central de Répression et de Cybercriminalité (OCRC). Cette détention, qualifiée d’arbitraire dans la lettre, a plongé la famille Amoussou dans une profonde inquiétude. « Steve avait été brutalisé et presque étranglé par ses assaillants », décrit la famille dans sa lettre, révélant ainsi la violence subie par le journaliste.

D’après la famille Amoussou, le procès expéditif du 3 septembre dernier avait trois objectifs. « Prioritairement, il avait pour but d’essayer d’innocenter Ouanilo Jérôme Medegan Fagla (Directeur Général de l’Agence Nationale pour la Sécurité des Systèmes d’Information au Bénin), cité dans le communiqué du procureur de la République du Togo comme le lien tangible entre l’enlèvement de Steve Amoussou en territoire togolais et le gouvernement béninois. Le deuxième objectif clair de ce procès était de protéger deux autres ravisseurs identifiés (Jimmy Gandaho et Gerauld Gbaguidi) en les rendant inaccessibles à la justice togolaise, et les sentences qui leur ont été données en sont la preuve. Enfin, ce procès visait également à exonérer le gouvernement béninois de toute implication dans les crimes commis par les ravisseurs au Togo », précise la lettre ouverte.

Des questions sans réponse

La lettre ouverte soulève plusieurs interrogations restées sans réponse, notamment : pourquoi avoir mis en détention la victime tout en laissant en liberté les ravisseurs dès le premier jour ? Pourquoi ne l’avoir pas interrogé sur les accusations de fraude, mais plutôt sur son identité supposée de “Hounvi” ? Pourquoi un prétendu commerçant résidant en Indonésie aurait-il investi 10 millions de francs CFA pour promouvoir son entreprise dans un pays où il ne vit plus, via un transfert “oral” ? Ces questions, lourdes de sens, illustrent à quel point l’affaire Steve Amoussou est entourée de mystères.

La famille précise également qu’« il est important de rappeler ici que Steve Amoussou n’a jamais exonéré Ouanilo Jérôme Medegan Fagla. Son honnêteté, en répondant aux questions fallacieuses de la cour, a été inutilement utilisée pour apaiser des consciences épuisées par la démence de leurs propres actes. Dire qu’il lui a été impossible d’identifier qui se dissimulait sous un masque ne signifie pas que ce n’était pas Ouanilo Jérôme Medegan Fagla. »

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Une attaque contre la liberté d’expression

Au-delà de l’aspect purement judiciaire, cette affaire, selon la famille Amoussou, s’inscrit dans un contexte plus large de répression de la liberté de la presse et d’expression au Bénin. « Le journalisme n’est pas un crime, et Steve Amoussou n’est pas un criminel. Il n’est que la victime d’une inquisition politique », déclare la famille dans sa lettre. Ils accusent les autorités béninoises d’instrumentaliser la justice pour réduire au silence ceux qui défendent des opinions contraires au pouvoir en place.

Le communiqué de la famille met en lumière un climat où « même dans leur pire souffrance, les populations ont perdu le droit de se plaindre, d’avoir une opinion ou de simplement revendiquer leurs droits ». Dans ce cadre, Steve Amoussou serait devenu une cible pour avoir refusé de compromettre ses valeurs et sa liberté d’expression.

La résilience face à l’injustice

Malgré les épreuves, la famille Amoussou conserve l’espoir et témoigne d’une profonde foi en la justice divine. Leur mère, âgée de 75 ans, bien que très affectée, a trouvé la force de dire : « Nous devons être reconnaissants à Dieu, car n’eût été sa fidélité, ce n’est pas un procès que nous serions en train de préparer, mais un enterrement. »

La lettre se conclut par un appel à la communauté internationale et au peuple béninois à ne pas se laisser duper par les machinations judiciaires en cours, en faisant référence à la tentative de coup d’État manquée. « Nous prions le peuple et la communauté internationale de ne pas être naïfs », avertit la famille, convaincue que la vérité finira par triompher dans cette affaire.

À l’approche du procès prévu le 7 octobre prochain, la famille Amoussou appelle à une mobilisation internationale pour exiger un jugement juste et transparent. Dans un dernier mot, elle remercie toutes les personnes et institutions qui soutiennent leur cause : « Vous êtes la preuve que tout ce qui est nécessaire pour un monde meilleur, c’est d’avoir le courage d’être humain. »

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