Gouvernance, Bénin – La nomination, ce 11 décembre 2024, de 12 ministres conseillers à la présidence de la République a ravivé un débat déjà largement entamé au début de l’année. Ces désignations, qui concernent principalement des figures politiques issues de la mouvance présidentielle, continuent de diviser l’opinion publique, certains remettant en cause leur utilité. Pourtant, le président Patrice Talon avait, lors d’une conférence de presse en février dernier, expliqué les motivations derrière cette réforme, soulignant une logique politique assumée. Retour sur les arguments du chef de l’État.
Dans sa conférence de presse du 8 février 2024, le président Patrice Talon avait justifié la nomination des ministres conseillers par la nécessité de recentrer l’action politique au cœur de la gouvernance. Revenant sur les frustrations liées à la place des technocrates au sein de son gouvernement depuis 2016, il avait reconnu qu’il y a « des fonctions qui ont été confiées à des gens qui n’ont pas du tout de chapeau politique, alors que ce n’est pas eux qui ont œuvré à conquérir le pouvoir.»
Cette déclaration visait les technocrates, experts nommés au sein du gouvernement pour leurs compétences techniques mais souvent éloignés des réalités politiques et sociales. Selon le président, bien que leur rôle soit crucial, leur manque d’ancrage politique posait problème. Les ministres conseillers, quant à eux, sont pensés pour combler ce fossé car, d’après le chef de l’État, ce sont des personnalités politiques proches des populations.
Rapprocher les décideurs des citoyens
Pour Patrice Talon, cette réforme des ministres conseillers vise également à répondre à un enjeu de représentativité. Il avait souligné que, dans un contexte où les ministres du gouvernement sont souvent « la tête dans le guidon », il est impératif d’avoir des personnalités capables (les ministres conseillers ndlr) de porter une vision globale et d’être en phase avec les attentes des citoyens.
« Il est impératif que ceux qui ont la tête dans le guidon aient à leur côté des conseillers, […] des gens qui portent la vision, qui connaissent les réalités du terrain » disait le chef de l’État.
Les ministres conseillers, en tant qu’intermédiaires entre le gouvernement et les populations, sont donc censés jouer un rôle clé dans cette nouvelle configuration. Leur proximité avec le terrain doit permettre de mieux ajuster les politiques publiques.
Une logique politique assumée
Le choix des 12 personnalités nommées hier lors du Conseil des ministres reflète cette volonté de renforcer l’ancrage politique de l’exécutif. On y retrouve notamment des anciens députés non réélus lors des dernières élections législatives et des présidents de “petits partis” politiques affiliés à la mouvance présidentielle. Ces nominations s’inscrivent dans une stratégie de consolidation politique, comme l’avait expliqué le président Talon en février dernier : « Ce sont les partis politiques qui devront pourvoir ces nominations-là, parce que c’est l’action politique qu’on voudrait remettre au centre des choses. »
Et pour preuve, le Bloc Républicain et l’Union Progressiste le Renouveau étaient largement représentés, de même que Moele Bénin et le parti La Renaissance (un poste de ministre conseiller chacun), tous des partis soutenant les actions du gouvernement, comme l’exige le décret portant création des ministres conseillers.
Une réforme toujours critiquée
Si cette logique était claire dans le discours présidentiel, elle n’a pas dissipé les critiques lors de la publication des noms des ministres conseillers. Certains estiment toujours que ces nominations s’apparentent davantage à un partage de récompenses politiques qu’à une véritable réforme institutionnelle. D’autres dénoncent une redondance dans les fonctions, mettant en doute l’efficacité et le coût de cette nouvelle structure.
En recentrant l’action politique au sein de l’exécutif, Patrice Talon espère répondre à des besoins d’efficacité et de représentativité. Mais dans un pays où les attentes des citoyens sont élevées, ces nominations devront faire leurs preuves pour dissiper les doutes et convaincre de leur pertinence. L’avenir dira si cette réforme contribuera à renforcer la gouvernance ou si elle restera une source de controverses.