Événement, Bénin – Depuis quelques jours, le Bénin vit une vague d’enthousiasme après l’annonce le jeudi 24 octobre 2024 du ministre de l’Énergie et des Mines, Samou Seïdou Adambi. Selon lui, le pays débutera la production et l’exportation de pétrole brut dès 2025, entrant ainsi dans le cercle restreint des producteurs d’or noir en Afrique de l’Ouest.
Alors que l’annonce suscite des espoirs de développement économique, elle réveille aussi des souvenirs mitigés et une certaine prudence. En effet, l’histoire pétrolière béninoise est marquée par des tentatives avortées et des promesses non tenues. Cette fois, peut-on vraiment croire que le Bénin parviendra à s’affirmer comme producteur et exportateur de pétrole ?
Le ministre Adambi affiche un optimisme résolu. Après plus de huit années de préparation, il estime que la production de pétrole brut en eaux profondes est sur le point de débuter, propulsant ainsi le Bénin dans le cercle restreint des nations exportatrices de « l’or noir ». Le gouvernement a, sans conteste, engagé des initiatives significatives en s’associant à des partenaires internationaux de renom pour explorer et exploiter ses ressources. Toutefois, au-delà des promesses, la réalité s’avère plus complexe.
Jusqu’à présent, le Bénin n’a jamais été un acteur majeur dans la production de brut, malgré quelques expériences sporadiques. L’extraction d’hydrocarbures sur le bloc de Sèmè a été interrompue il y a quelques années sous le régime de l’ancien président Yayi Boni. En effet, au cours d’une audience à la présidence, la compagnie nigériane Sapetro, porteuse de tous nos espoirs de pétrole à cette époque, annonce au Chef de l’État d’alors qu’elle arrête les opérations d’exploration sur son bloc. La raison avancée : une absence de pétrole exploitable, les puits ne contenant que de l’eau à 100 %. Le mini-gisement découvert nécessitait un investissement de 67 millions de dollars, pour une rentabilité évaluée à seulement 40 millions de dollars. Sapetro se retire ainsi, mettant brutalement fin à nos rêves d’Emirats.
Avec le nouveau régime du président Patrice Talon, si l’on se réfère aux propos du ministre Adambi, les travaux ont repris il y a 8 ans avec de nouveaux acteurs. Parmi eux, nous pouvons citer la société singapourienne Rex, qui s’efforce depuis quelques mois de relancer l’exploitation. Néanmoins, l’incertitude demeure quant à la rentabilité et à la faisabilité technologique de ces projets.
Des stratégies pour séduire les investisseurs
Le 22 octobre 2024, la Société des Hydrocarbures du Bénin a mandaté TGS, un prestataire de services pétroliers, pour mener des études sismiques 3D sur 2 248 km² dans les eaux béninoises. Ces études permettront aux autorités d’évaluer plus précisément le potentiel géologique du pays et de proposer un profil attractif aux investisseurs.
Une telle initiative est cruciale, car une meilleure compréhension des sous-sols pourrait convaincre des opérateurs de s’engager. Il est cependant important de noter que le Bénin n’est pas le seul à prospecter dans cette région, faisant face à une concurrence redoutable de pays voisins comme le Nigeria et le Niger, qui disposent d’industries pétrolières bien établies et de marchés structurés.
Un pari économique à haut risque
Le Bénin aspire à capitaliser sur le regain d’intérêt international pour les hydrocarbures, mais ce pari n’est pas sans risques. La transition énergétique mondiale et les pressions croissantes pour réduire les émissions de gaz à effet de serre pourraient compromettre la viabilité des nouveaux projets pétroliers à moyen terme. Dans ce contexte, alors que la valeur stratégique de l’or noir s’amenuise, le Bénin sera-t-il en mesure d’attirer des investisseurs en quête de profits rapides, ou devra-t-il se contenter d’un marché local restreint et incertain ?
En attendant, pour que le rêve pétrolier se transforme en réalité, les autorités béninoises doivent prouver que le potentiel pétrolier du pays ne relève pas d’une simple chimère. Malgré la détermination révélée par le ministre Adambi en donnant une date, le chemin est semé d’embûches. Tout en restant optimistes, espérons que cette fois-ci soit la bonne. Le Bénin, pays producteur et exportateur de pétrole, c’est bien possible quand on a des pays limitrophes comme le Nigeria et le Niger. Et cet optimisme date depuis bien longtemps, alors peut-on y croire vraiment ? Rendez-vous en 2025.
Comments 1