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Éditorial : David Koffi Aza, un faux pas qui nécessite des mesures fermes

Éditorial, BéninLes propos du dignitaire et prête du Fâ David Koffi Aza, membre du Comité des Rites Vodun du Bénin, ont fait ces derniers jours grand bruit en raison de leur caractère politiquement engagé. En déclarant que l’interprétation du Tofâ 2025 révèle la nécessité d’un troisième mandat pour le président Patrice Talon, David Koffi Aza a dépassé les limites en utilisant une pratique spirituelle pour justifier une prise de position politique sensible et controversée.

Cet écart avec la neutralité attendue d’un membre d’une institution spirituelle aussi respectée a suscité une vive réaction de l’opinion publique. Et si le Comité des Rites Vodun a pris soin de publier hier (14-01-2025) un communiqué de désaveu, il est évident que cette réaction est insuffisante face à la gravité de la situation.

La séparation entre politique et spiritualité mise à mal

Le Comité des Rites Vodun a pour vocation de rester apolitique et de servir d’ancrage spirituel pour les Béninois, sans se mêler des débats politiques. En se livrant à des commentaires en faveur d’un troisième mandat, David Koffi Aza a violé cette règle fondamentale. Ses propos, loin de se cantonner à des considérations spirituelles, ont semé le trouble et brouillé les frontières entre la religion et la politique. Plus qu’un dérapage, il s’agit d’une instrumentalisation de la spiritualité à des fins politiques, ce qui met en péril la neutralité de l’institution.

Un tel écart de conduite ne peut être pris à la légère. Le Bénin, un pays dont la diversité culturelle et spirituelle constitue l’une de ses grandes forces, ne peut plus se permettre de voir ses traditions être détournées à des fins partisanes. Les institutions spirituelles doivent préserver leur indépendance, au même titre que les autres sphères de la vie publique. Si un membre de cette institution se permet d’entrer dans l’arène politique de cette manière, cela fragilise les fondations mêmes de l’ordre républicain et de la laïcité.

La nécessité d’un retrait immédiat et définitif

Un simple communiqué de désaveu ne saurait suffire pour réparer les dégâts causés. La réaction du Comité des Rites Vodun doit aller au-delà des mots et se traduire par une décision ferme : la suspension de David Koffi Aza de ses fonctions de membre du comité en attendant son retrait définitif par un nouveau décret du Président de la République. Ce geste permettrait de rétablir la crédibilité de l’institution et de rappeler que la politique et la spiritualité doivent rester deux domaines distincts.

Laisser Aza en place, après une prise de position aussi claire en faveur d’un éventuel « agenda politique », risquerait de laisser entendre que ces opinions sont tolérées, voire validées par le comité et l’exécutif. Cela ouvrirait la voie à de futures dérives où les acteurs des structures étatiques sensibles seraient mises au service d’intérêts politiques, affaiblissant ainsi la confiance des citoyens dans leurs institutions et leur système de valeurs.

Ne pas retirer David Koffi Aza de ses fonctions risquerait également d’envoyer un message dangereux à la société, celui qu’il pourrait avoir été envoyé en mission, comme un « ballon d’essai », dans l’optique de tester la faisabilité d’un projet plus large, tel qu’une révision constitutionnelle visant à permettre un troisième mandat pour le président Patrice Talon. Bien que ce dernier ait, à plusieurs reprises, affirmé qu’il ne briguerait pas un second mandat, les paroles d’un homme politique n’engagent souvent que ceux qui y croient. Laisser David Koffi Aza en place après ses propos pourrait laisser penser que l’institution spirituelle a été utilisée pour sonder l’opinion publique sur des sujets politiquement sensibles.

Des mesures plus strictes pour préserver la stabilité nationale

Au-delà de la mise à l’écart de David Koffi Aza, il est impératif que les autorités compétentes prennent les mesures nécessaires pour protéger l’ordre public. En effet, les propos du prête Fâ en question ont créé une situation de trouble à l’ordre public, alimentée par la confusion qu’ils ont générée parmi les citoyens. Dans ce contexte, il est légitime de considérer une procédure judiciaire pour trouble à l’ordre public, afin de souligner la gravité des faits et de rappeler à chacun que la politique ne doit pas interférer avec les domaines sacrés des rites et des croyances. Mais surtout pour le respect de la loi fondamentale du pays qu’est la constitution qui interdit tout projet de troisième mandat et qui dispose qu’un Président de la République ne pourra faire “plus de deux mandats dans sa vie.”

Le Bénin mérite des institutions qui incarnent les valeurs de respect, de neutralité et de paix sociale. En ne prenant pas des mesures fermes face à cette dérive, on risquerait de créer un précédent dangereux. En conséquence, au-delà du retrait d’Aza du comité, une action judiciaire doit être envisagée pour garantir que de telles dérives ne se reproduisent pas, et pour préserver l’équilibre de notre démocratie qualifiée depuis peu de fragile.

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