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Télécoms en Afrique : pourquoi SONATEL perd une étoile sans perdre sa stature

Notation financièreEn abaissant la note de crédit de SONATEL, GCR Ratings alerte sur une pression croissante exercée sur les flux de trésorerie de l’un des géants ouest-africains. Derrière les bons résultats financiers, un arbitrage délicat entre politique d’investissement, redistribution actionnariale et discipline de bilan.

Profitable, faiblement endettée, dominante sur ses marchés… Pourtant, la Société nationale des télécommunications du Sénégal (SONATEL) vient de voir sa note d’émetteur long terme abaissée d’un cran par GCR Ratings, passant de AAA(WU) à AA+(WU). Dans le même élan, son emprunt obligataire de 100 milliards FCFA lancé en 2020 est également rétrogradé. L’agence n’a pas sanctionné une chute de performance, mais un déséquilibre latent entre ambition et capacité financière réelle.

Capex et dividendes : des choix qui pèsent

Le cœur du diagnostic tient en trois chiffres : +18,5 % d’augmentation des investissements en 2024, +38,7 % de progression des décaissements de dividendes, et un taux de couverture de la dette qui chute de 38 % à 20 % en un an.

Cette dilution de la marge de manœuvre financière n’est pas encore alarmante, mais suffisamment significative pour que GCR tire la sonnette d’alarme. « Le levier financier reste faible, la rentabilité robuste, mais la génération de cash ne suit pas le rythme des ambitions », résume notre analyste du côté de la BRVM. En clair, poursuit-il, SONATEL ne vit pas au-dessus de ses moyens, mais elle mobilise des ressources à un rythme qui pourrait devenir insoutenable sans régulation interne.

Une performance économique pourtant solide

L’ironie de la situation, c’est qu’en 2024, SONATEL a signé l’un de ses meilleurs exercices. Selon les données figurant dans la notation financière, on peut lire un chiffre d’affaires de 1 776,4 milliards FCFA (+9,6 %), un EBITDA en hausse de 15,9 % atteignant 850,4 milliards FCFA, et un résultat net de 393,7 milliards FCFA, en croissance de 18,7 %.

La dynamique est portée par les relais numériques : Data mobile (+19,8 %), Orange Money (+16 %), haut débit fixe (+24 %). Même les marges, souvent attaquées dans le secteur, restent solides (47,9 %). C’est dire si le signal de GCR ne porte pas sur les revenus, mais bien sur l’utilisation stratégique des cash-flows générés.

Une alerte, pas une sanction

La perspective reste stable. GCR reconnaît la solidité du modèle économique, l’ancrage régional de la marque Orange, la gouvernance alignée sur les standards internationaux, et une politique ESG en progression. Mais dans un environnement marqué par une saturation des services traditionnels (voix, SMS), la montée d’acteurs disruptifs (fintechs, opérateurs satellites), et une réglementation plus intrusive, les marges de SONATEL pourraient se comprimer si la transformation de son modèle n’est pas rigoureusement financée. « À ce niveau, la prudence n’est pas une vertu, c’est une obligation de crédibilité », note notre spécialiste à la rédaction.

L’équation est connue mais délicate : investir pour rester en tête, rémunérer pour fidéliser les actionnaires, garder une assise financière pour sécuriser les financements futurs. SONATEL a toujours su conjuguer ces impératifs. Mais en 2024, les curseurs se sont légèrement déplacés. Pas de crise, mais une alerte sur la soutenabilité du rythme.

Les prochains mois seront donc décisifs. Un ajustement de la politique de dividendes, un redéploiement plus efficace du capital investi ou une consolidation de la génération de cash pourraient suffire à restaurer la note. À défaut, c’est la perception de la gouvernance financière même du groupe qui pourrait être mise en cause.

En somme, SONATEL reste solide, mais moins intouchable. Et c’est précisément ce que dit GCR : l’équilibre stratégique est une ligne de crête — pas une ligne droite.

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