Gouvernance, Bénin – Dans ce deuxième volet de notre série consacrée aux conclusions de l’audit des marchés publics de 2021, la rédaction de La Marina BJ s’intéresse à la municipalité de Cotonou. L’audit, réalisé par le cabinet NIMADEN L. Expertises SARL, révèle des anomalies inquiétantes dans la gestion des projets financés par des fonds publics.
Entre matériels acquis mais introuvables, équipements sous-exploités et infrastructures montrant des signes précoces de dégradation, les constats posent des questions cruciales sur la transparence et le suivi des projets publics dans la capitale économique du Bénin.
Des équipements médicaux introuvables et un suivi insuffisant
L’un des marchés audités portait sur l’acquisition d’équipements de laboratoire, de matériels médico-sociaux et la construction d’un bâtiment sanitaire, un contrat confié à CMAB GROUP. Lors de la visite effectuée le 15 février 2024, les auditeurs ont relevé des irrégularités préoccupantes dans la traçabilité des équipements. Parmi les 25 équipements destinés aux centres de santé et les 14 équipements de laboratoire prévus dans le contrat, plusieurs matériels demeurent introuvables. Les équipements manquants incluent six congélateurs biomédicaux, deux appareils de radiographie numérisée mobile, cinq autoclaves bactériologiques, dix plateaux de soins et cinq paravents médicaux de séparation.
L’absence de ces matériels a été constatée lors de vérifications sur le terrain et dans les procès-verbaux de réception. Au centre hospitalier de Suru-Léré, l’équipe d’audit a découvert six lits de réanimation modernes qui ne correspondent pas à ceux inscrits dans le contrat et qui ne portent aucune estampille permettant de les associer au marché en question. Ces anomalies soulèvent de sérieuses inquiétudes sur la destination réelle des équipements prévus et sur la gestion documentaire liée à leur distribution.
Des dispositifs anti-COVID désormais inutilisés
Dans un autre marché, attribué à KOJEFCATH SARL pour un montant de 39 211 400 FCFA, des dispositifs de lave-mains et d’autres matériels ont été acquis pour lutter contre la propagation de la COVID-19 dans le cadre des examens nationaux. Lors de la visite effectuée le 15 février 2024, les auditeurs ont confirmé que les équipements ont été acquis et distribués grâce aux bons d’entrée, de sortie et aux décharges des bénéficiaires.
Cependant, une fois la crise sanitaire atténuée, ces équipements ne sont plus utilisés, ce qui rend leur entretien et leur stockage difficilement justifiables. Ce constat met en exergue un problème récurrent de réaffectation et de gestion des équipements acquis dans un contexte d’urgence, mais dont l’utilité se réduit une fois la situation normalisée.
Des dégradations précoces sur des infrastructures importantes
Un autre marché, portant sur la construction de voies pavées dans les 9ᵉ au 13ᵉ arrondissements de Cotonou, a été attribué à AKOA BENIN SARL (ABS) pour un montant de 340 617 976 FCFA. Les travaux ont été inspectés comme les deux autres le 15 février 2024 et jugés globalement conformes aux spécifications techniques. Toutefois, après la réception définitive, des dégradations précoces, notamment des tassements différentiels, ont été constatées sur plusieurs sections. Ces anomalies remettent en question la durabilité des travaux et soulignent l’importance d’un suivi post-réception rigoureux pour identifier et corriger rapidement de telles failles.
D’après le rapport d’audit, un problème récurrent relevé dans ces trois marchés de la municipalité de Cotonou est l’insuffisance du système d’archivage et de gestion documentaire. Dans plusieurs cas, les procès-verbaux de réception sont absents ou incomplets, compliquant ainsi la traçabilité des acquisitions et des travaux réalisés. Cette lacune entrave, selon l’équipe d’audit, toute tentative d’évaluation complète et transparente de la gestion des fonds publics.