Commerce extérieur, La Marina BJ – Entre janvier 2024 et juin 2025, les données de l’INStaD sur le commerce extérieur du Bénin, analysées par notre partenaire WE Connector, confirment une asymétrie persistante. Parmi les dix premiers partenaires du Bénin, Paris demeure un fournisseur clé de Cotonou, troisième partenaire régulier derrière l’Inde et la Chine. Mais ses achats auprès du Bénin restent marginaux, loin des dynamiques observées avec l’Asie ou l’Amérique du Nord. Décryptage
Trimestre après trimestre, la France maintient une place solide dans les importations béninoises, oscillant entre 8 % et 10 % du total, soit en moyenne 18 à 21 milliards de FCFA par trimestre.
Au premier trimestre 2024, elle représente 9,6 % des importations du Bénin, avec 10,8 milliards de FCFA consacrés aux médicaments, 3,6 milliards au fil machine en acier et 1,2 milliard aux préparations alimentaires. Trois mois plus tard, sa part monte à 10 %, soutenue par 7 milliards de FCFA de médicaments génériques, 3,7 milliards d’antibiotiques et 4,5 milliards de produits pétroliers transformés. Au troisième trimestre 2024 , la tendance reste stable à 10 %, avec 10,6 milliards de médicaments et 2,5 milliards de fil machine. Le quatrième trimestre de cette même année affiche 9,8 %, dont 9,8 milliards de médicaments, 3,4 milliards d’antibiotiques et 2,8 milliards de machines agricoles.
En 2025, la dynamique se poursuit : 9 % au premier trimestre, dominés par 11,3 milliards de médicaments, 4 milliards d’antibiotiques et 2,1 milliards de matériaux de construction, puis 8,1 % au deuxième trimestre, pour environ 18 milliards de FCFA, dont 7,7 milliards de médicaments et 3 milliards d’antibiotiques. En un an et demi, les importations béninoises de produits pharmaceutiques français dépassent ainsi 50 milliards de FCFA, confirmant une dépendance forte dans ce secteur vital.
Exportations : La France absente des radars
Du côté des exportations, l’écart est frappant. Le coton, produit roi du Bénin, trouve ses principaux débouchés en Asie et en Amérique du Nord.
Au premier trimestre 2024, 42,7 % des ventes sont dirigées vers le Bangladesh, une proportion qui grimpe à 56,7 % au deuxième trimestre puis à 59,1 % au premier trimestre 2025. Les États-Unis se hissent à 19,2 % au troisième trimestre 2024, tandis que le Danemark capte 26 % des exportations au quatrième trimestre de la même année.
La France, elle, reste un acteur quasi invisible. Elle n’apparaît qu’au troisième trimestre 2024 avec une part limitée à 2 %, et au deuxième trimestre 2025 avec un léger rebond à 5,4 %, mais toujours loin derrière l’Inde (7,5 %) et les États-Unis (6,3 %). Sur six trimestres étudiés par notre partenaire, le cabinet de conseil et d’études stratégiques WE Connector, Paris ne figure donc que deux fois dans le classement des dix premiers clients du Bénin, avec des parts oscillant entre 2 et 5 %.
À noter que la France n’est pas seule dans cette position asymétrique. La Chine, deuxième fournisseur régulier du Bénin avec des parts comprises entre 10 % et 16 % des importations, alimente massivement le marché local en acier, équipements télécoms, constructions métalliques et engrais. Mais du côté des exportations béninoises, Pékin n’apparaît que rarement, bien que mieux que la France avec 1 % au premier trimestre 2025, 8,7 % au premier trimestre 2024, 2 % au deuxième trimestre 2024, et absente des autres trimestres étudiés.
L’Inde, en revanche, offre un modèle légèrement différent. Premier fournisseur du Bénin avec un record de 30 % des importations au premier trimestre 2025, pour un volume massif de riz, elle figure aussi parmi ses clients, absorbant régulièrement entre 6 % et 10 % des exportations, soit 7 à 12 milliards de FCFA par trimestre, essentiellement du soja, des tourteaux et du bois. La relation commerciale reste déséquilibrée, mais elle est au moins bilatérale, renforcée par la réouverture de l’ambassade du Bénin en Inde (lire LMBJ du 27/02/2025).
Une relation commerciale structurellement asymétrique
Au-delà des statistiques brutes, notre spécialiste à la rédaction souligne que « la France est quand même un client du Bénin, mais un client marginal ». Selon lui, « la France achète certes quelques volumes — mangues, ananas, soja, parfois du coton — mais ces flux sont trop limités pour peser dans la balance commerciale ».
Dans les faits, la relation bilatérale est donc marquée par une asymétrie structurelle. Fournisseur incontournable, la France conserve une place stratégique dans les importations béninoises, notamment grâce à son industrie pharmaceutique. Mais en tant que client discret, elle ne parvient pas à rivaliser avec les acheteurs asiatiques et parfois américains, qui dominent largement les exportations béninoises.
Cette situation illustre une réalité : la relation commerciale franco-béninoise reste profondément déséquilibrée comme le cas également de Bangladesh. Si Paris veut préserver son influence économique en Afrique de l’Ouest – déjà fragilisée dans l’espace AES – il lui faudra passer du rôle de simple fournisseur à celui de véritable partenaire, en intégrant davantage les produits béninois dans ses chaînes de valeur.